mardi 30 septembre 2008

Aimez-vous les nouvelles étrangères?

Pour ceux et celles qui s'intéressent aux nouvelles du monde, Internet est une véritable bénédiction. D'un clic on accède à une multitude de sources et à l'information diversifiée qu'offrent les grands médias de partout qui accordent une place prépondérante aux affaires internationales. Mais cette concurrence nouvelle complique la vie des petits médias nationaux et les oblige à revoir leur façon de faire.

Quelques grands médias britanniques ont trouvé aux Etat-Unis un terreau fertile. La BBC (www.bbc.co.uk) bien entendu, mais aussi quelques-uns des principaux quotidiens, les "quality papers". Un rapport du comité des communications de la Chambre des Lords publié en juin dernier nous apprend qu'un tiers seulement des lecteurs en ligne du Times de Londres (www.thetimes.co. uk) sont domiciliés au Royaume-Uni. Plus de 3 millions d'Américains (visiteurs uniques)fréquentent chaque mois le site du Times et l'on prévoit qu'ils seront cinq millions dans 5 ans. Le lectorat en ligne du Guardian (www.guardian.co. uk) aux USA est maintenant beaucoup plus important que celui du LA Times, l'un des grands journaux américains.

Aux Etats-Unis, les médias locaux ont baissé les bras et laissent aux grands médias nationaux comme le New York Times le soin d'informer ceux qui s'intéressent aux affaires du monde. Le contenu des médias locaux devient de plus en plus local, "hyperlocal".

Il serait intéressant de mieux connaître la place qu'occupent, dans la consommation des québécois branchés sur le monde, les médias français (www.LeMonde.fr, www.LeFigaro.fr, www.France24.fr, etc. ), dont les sites sont riches en informations étrangères, mais aussi certains sites de langue anglaise, américains ou britanniques. Je suis étonné du nombre de jeunes gens que j'ai rencontrés ces derniers mois et qui me disent fréquenter régulièrement la BBC sur Internet. Comscore, à l'aide!

Devant cette offre pléthorique, comment Le Devoir ou Le Soleil peuvent-ils espérer retenir le lecteur intéressé avec quelques dépêches d'agences, bien faites mais impersonnelles. La Presse fait depuis quelques années des efforts louables en envoyant ses journalistes à l'étranger. Mais cela coûte cher. Le défi des médias et des journalistes d'ici est de faire voir que les affaires du monde sont aussi les nôtres et que ce qui semble de prime abord bien étranger est souvent plus "local" qu'on l'avait imaginé. S'enfermer dans la nouvelle étroitement locale, comme le font de nombreux médias américains, constitue la pire des politiques à courte vue.

jeudi 25 septembre 2008

Qu'est-ce qu'un journaliste (suite)

Les commentaires reçus sont très intéressants.
L'une, Johanne, pose une question: "Qu'est-ce qui caractérise le journaliste professionnel?" L'autre, Françoise, répond longuement et fort bien. Merci.

Je voudrais revenir au commentaire de Maxime, étudiant en communication publique. En expliquant le contexte. Dans le cadre du tournage de notre documentaire, nous avons rencontré cette semaine un groupe d'étudiants en communication de l'Université Laval. Dans ma brève présentation des changements que vit le monde du journalisme, j'ai insisté sur certains traits qui caractérisent le rapport qu'entretiennent les jeunes adultes avec les médias:le souci d'interactivité, la nécessaire mobilité du support, l'attrait pour les médias gratuits, une certaine lassitude vis-à-vis de la façon traditionnelle de présenter les nouvelles tout comme de l'avalanche d'informations qu'ils subissent. Le texte de Maxime doit être lu dans ce contexte. Quand il écrit par exemple: "Les dites nouvelles ont plus ou moins d'impact dans ma vie directe ou dans celle de mon entourage. "C'est peut-être cela que décrit Marc-Olivier en parlant du "besoin des citoyens pour un autre type de récit, une autre manière de raconter les événements. "Un exemple parmi d'autres de journalistes sachant dire les choses autrement: Michèle Ouimet de La Presse. Je suggère aussi la lecture des textes remarquables d'Anne Nivat, dont le livre Chienne de guerre (Fayard, 2000), où elle raconte ses séjours en Tchétchénie.

Je reviens à la question: "Qu'est ce qu'un journaliste?" J'aime bien l'expression "un allumeur de réverbères". Mon ami Louis Martin, l'un des journalistes importants du dernier demi-siècle avait aussi sa définition: "C'est le standardiste qui branche les fils sur les circuits porteurs. "Celui qui fait le tri dans le flot d'informations et met en perspective "l'immense cafouillis" quotidien. Une tâche parfois humble mais essentielle. Je reviendrai une prochaine fois sur l'idée de quatrième pouvoir.

lundi 22 septembre 2008

L'activité journalistique

J'ajoute mon premier grain de sel à la conversation (encore restreinte). Selon l'article de la Columbia Journalism Review dont la lecture a été proposée par Philippe Marcoux,la vraie question ne serait pas "Qu'est-ce qu'un journaliste?" mais plutôt "Qu'est-ce que le journalisme?". Bruno Boutot définit ainsi l'activité journalistique: "Recueillir des informations auprès de sources et les présenter à un public." Je crois en effet que c'est cela la spécificité du journalisme: la collecte des faits et leur vérification. Le journaliste peut bien aussi commenter l'actualité, mais ce n'est pas ce qui caractérise son travail. Le journaliste, c'est le témoin. Le témoin "professionnel."

Il faut, je pense, distinguer l'activité journalistique de la liberté d'expression et d'opinion qui appartient à tous. Chaque citoyen peut s'exprimer par blogue ou autrement et contribuer par ses commentaires et opinions, en certains cas de façon notable, à la circulation de l'information et des idées. Mais ce n'est qu'exceptionnellement qu'il exercera le rôle de témoin que remplit le journaliste. En disant cela, je ne dénigre pas les journalistes-citoyens et je ne partage pas l'attitude hautaine et suffisante de certains journalistes traditionnels à leur endroit.Le
citoyen peut aussi être à l'occasion ce témoin mais ce ne sera pas de façon régulière ou continue. Ce n'est pas son métier.
F.S.

jeudi 18 septembre 2008

QU'EST-CE QU'UN JOURNALISTE?

"Jadis, dit-on, le journalisme, c'était un cours magistral. Un monologue. Internet en a fait un séminaire, une conversation. "La formule, bien tournée, illustre deux conceptions du journalisme. Dans l'une, élitiste, convenons-un, le journaliste, celui qui sait, sélectionne chaque jour les faits et les événements que le public doit selon lui connaître. Dans l'autre, tributaire de l'évolution de l'internet et de l'interactivité, le journaliste perd son magister et doit dialoguer avec un public dont les médias sollicitent sans cesse les avis et opinions, d'un intérêt pour le moins variable.

Bien plus, les citoyens, les jeunes en particulier, sont de plus en plus nombreux à proposer et échanger sur Internet leur propre contenu d'information ou celui qu'ils ont bricolé à partir de produits existants. Ce journalisme-citoyen annonce, selon ses promoteurs, un monde où une armée d'internautes, An Army of Davids, selon le titre d'un livre publié aux USA, contribueront à la chute des Goliaths, les "gros" gouvernements et les grandes entreprises, et de leur porte-voix dans les grands médias. D'autres au contraire se désolent du poids croissant de cette "démocratie de l'information" et regrettent le temps où le journaliste servait encore de référence. "En vérité, écrit le journaliste et professeur français Jacques Julliard, le crétinisme démocratique n'a pas de limite."

En 1978, Jacques Godbout et moi avons décrit dans un documentaire intitulé Derrière l'image le passage du journalisme de l'écrit à l'audiovisuel, le passage du magister et de l'autorité morale du journal au téléjournal. Trente ans plus tard alors que tant la presse écrite que les informations télévisées subissent l'assaut de l'internet, nous amorçons le tournage d'un autre documentaire consacré à la trans-formation du journalisme. Où est passé le 4ième pouvoir? Qu'est-ce qui se cache Derrière la toile?

Ce site est à l'enseigne de l'interactivité omniprésente. Je vous propose, au delà des questions, importantes mais largement discutées, de réorganisation des rédactions et de financement des médias, un dialogue sur l'avenir même du journalisme et des journalistes? Qu'est-ce qu'un journaliste quand chacun, ou presque, croit pouvoir faire son propre journalisme?


Vos réflexions alimenteront la nôtre.